← Retour

La Cimade Bretagne+PdL

« [Dans les CRA,] le climat en rétention est de plus en plus violent et anxiogène. La sécurité des personnes enfermées et intervenantes est difficilement garantie. […] Les pratiques illégales, telles que les expulsions de personnes ayant déposé un recours suspensif ou une demande d’asile, se sont multipliées, rendant vaines les démarches entreprises. »

L’intervention de La Cimade dans des camps a jalonné son histoire depuis sa création en 39 (déplacés d’Alsace/Lorraine, camp d’internement de Gurs en 40, réfugiés des pays de l’Est en Allemagne en 46, internés algériens, Harkis et rapatriés d’Indochine dans les années 50 et 60.

Notre engagement dans les CRA depuis 1984 s’inscrit dans cette dimension forte à savoir, notre volonté d’être auprès des personnes étrangères dans des lieux où elles sont privées de liberté et où peu d’acteurs citoyens interviennent. Pour autant, agir en rétention n’est jamais allé de soi. S’il y eut des débats internes (crainte d’une collaboration avec une politique d’exclusion) nous avons finalement accepté cette proposition de l’Etat, considérant notamment qu’une présence et un regard extérieur étaient préférables au silence et au secret des geôles inaccessibles.

Avant, les étrangers interpellés sous le coup d’une mesure d’éloignement étaient condamnés et envoyés en prison en attendant leur renvoi effectif. Ce n’était ni acceptable sur le plan des principes (amalgame étranger sans papiers = délinquant) ni sur celui du respect des droits et de la dignité des personnes, empêchées dès lors de faire valoir leurs droits et/ou de préparer leur départ. Mieux valait des lieux de rétention prévus à cet effet plutôt que la prison ou des cellules de garde-à-vue dans des commissariats. La découverte du centre d’Arenc près de Marseille avait montré que l’enfermement (décision et conditions) était avant laissé au seul arbitraire des autorités, sans cadre légal.

Mais au fil des années et du durcissement des politiques migratoires, les CRA sont devenus le symbole de la répression des étrangers en situation irrégulière. Ils sont des prisons qui ne dise pas leur nom. Nous revendiquons à terme la fermeture de ces centres ; en attendant nous exigeons de rendre effectivement exceptionnel le placement en rétention administrative, d’interdire le placement en rétention des familles, avec ou sans leurs enfants, des femmes enceintes, des personnes vulnérables ; de réduire la durée de rétention, de fermer les LRA et d’interdire leur création provisoire.

La Cimade, a fait évoluer ses missions en rétention vers un accompagnement davantage juridique que social. Le durcissement des politiques publiques l’a également amenée à renforcer et développer ses actions de dénonciation, de témoignage et de plaidoyer contre l’enfermement administratif des personnes étrangères. Elle n’intervient en rétention que si elle a le droit de témoigner librement et peut apporter aux personnes retenues une aide juridique réelle, non limitée à une simple information sur les droits,

Les dernières évolutions législatives et réglementaires ainsi que le durcissement des pratiques des autorités ont largement impacté le cadre de l’intervention en rétention :

  • Augmentation de la durée maximale de rétention et de la durée moyenne de rétention, sans développement de dispositifs pour permettre une prise en charge médicale adaptée ;
  • Enfermement quasi systématique des personnes sortant de prison ou signalées pour trouble à l’ordre public, même dans les cas où il n’existe aucune perspective d’expulsion ;
  • Enfermement répété de personnes protégées contre l’expulsion (état de santé, vie privée et familiale, craintes en cas de retour) ou souffrant de troubles psychiatriques, parfois incapables consentir pour entamer des démarches
  • Usage disproportionné de la mise à l’isolement, notamment pour des personnes en détresse psychologique ;
  • Augmentation des violences policières et multiples violations des droits ;
  • Maintien d’un taux d’occupation élevé dans les CRA et sous-effectif policier constant, etc.

Ainsi, le climat en rétention est de plus en plus violent et anxiogène. La sécurité des personnes enfermées et intervenantes est difficilement garantie. En parallèle, les marges de manœuvre juridique se sont réduites, en raison des évolutions législatives mais également du placement en rétention grandissant de personnes ne pouvant plus contester leurs mesures. De la même façon, les pratiques illégales, telles que les expulsions de personnes ayant déposé un recours suspensif ou une demande d’asile, se sont multipliées, rendant vaines les démarches entreprises. En conséquence, les sentiments d’impuissance et de perte de sens des missions sont croissants chez les intervenants en CRA.

La version promulguée de la loi dite “Darmanin” en janvier 2024 contient des articles, qui, sans surprise, durcissent encore davantage les conditions d’enfermement des étrangers.

  • Doublement de la 1ère phase de la rétention administrative, un retenu pourra y rester 4 à 6 jours sans contrôle d’un juge indépendant.
  • Suppression de plusieurs catégories protégées contre les OQTF (parents d’enfants français, conjoints de français etc.)
  • Limitation des possibilités de libération par le JLD en cas d’atteinte aux droits ; Possibilité d’un maintien en rétention après la libération par le JLD pendant 24 heures et non plus 10 heures, pour permettre au procureur de déposer un appel suspensif.
  • Placement en rétention sur le seul fondement fourre-tout de « menace à l’ordre public ».
  • Possibilité pour l’administration de placer à nouveau une personne en rétention deux jours seulement après sa libération, contre 7 jours précédemment. La rétention pourra donc durer en réalité 6 mois, entrecoupées de seulement 2 jours de liberté.
  • Généralisation des audiences par visioconférence devant le juge des libertés et de la détention (JLD) et le juge administratif.
  • Possibilité d’enfermer en rétention des demandeurs d’asile soupçonnés de “menace à l’ordre public” ou arrêtés à la frontière. 
  • Interdiction relative de l’enfermement des enfants (exclu des zones d’attente et au CRA de Mayotte qu’en janvier 2027…)

Lorsque le ministre de l’Intérieur a annoncé sa volonté de doubler le nombre de place de rétention entre 2023 et 2027 (objectif 3000 places) et que des nouveaux chantiers ont été lancés et notamment celui de NANTES, c’est tout naturellement que la CIMADE s’est associée à la coordination COLERE NANTES, CRA ni ici ni ailleurs ! afin de rappeler ses objectifs :

  • La fin de l’enfermement administratif des personnes étrangères et la fermeture des centres et locaux de rétention administrative.
  • D’ici là, défendre les droits des personnes enfermées en rétention administrative.
  • Faire connaître et dénoncer l’enfermement administratif et le durcissement des politiques migratoires
  • Faire évoluer la politique d’enfermement et d’expulsion des personnes étrangères en faveur d’une politique d’accueil digne et d’une liberté de circulation et d’installation

← Retour

Atelier de français de Nantes
Les Amoureux au ban public Nantes
Patron.ne.s Solidaires
Révolution Écologique pour le Vivant Pays de la Loire
UDB Loire-Atlantique